
La tour-porche
Ce bâtiment appelé « tour-porche » ou encore « ancien pigeonnier » est un des rares vestiges du château que fit édifier le bailli royal Jean Gaspard de Hatzel sur la colline du Geisberg entre 1711 et 1716. Parfaitement orienté et disposant d’une vue imprenable sur la plaine du Rhin, ce bel ensemble architectural fut en grande partie ravagé par un incendie au cours des combats de 1940, et ne put être reconstruit. À l’origine, on traversait ce bâtiment au rez-de-chaussée par deux portes charretières datées de 1711, pour entrer ou sortir de la cour intérieure du château. Ici même il y a un siècle, on se trouvait dans cette cour, un vaste carré délimité à l’est – derrière vous – par le corps de logis, et dans les autres directions, par des dépendances agricoles. 1
Suite à la Révolution française, le domaine fut divisé et pu être en partie racheté par les mennonites qui en exploitaient la ferme depuis les années 1720. En 1849, l’un d’eux, Daniel Hirschler vendit la tour-porche à la communauté, pour qu’elle puisse y célébrer le culte. Aménagée au 1er étage, la chapelle servit de 1849 à 1973 – avec une interruption de septembre 1939 à août 1947, car elle fut endommagée par un obus en 1940 et dut être restaurée (voir vue intérieure ci-dessous). Avant la seconde guerre mondiale, ce n’était pas le seul lieu de culte de l’assemblée, qui se réunissait alternativement dans différentes fermes d’Alsace du nord et du Palatinat, d’où provenaient bon nombre de ses membres. 2
A l’origine, pour les besoins de la famille De Hatzel, le château abritait une chapelle dédiée à Saint Martin, desservie par les moines Augustins de Wissembourg ; et 2 cloches surmontaient son entrée principale. Fait intéressant : jusqu’en 1939, la plus grande resta en service pour annoncer le culte des mennonites – avant de disparaître durant le conflit. Sa « petite sœur », datée de 1714, a heureusement pu être conservée jusqu’à aujourd’hui.
En 1962, la tour-porche cessa d’être un « passage » puisqu’au rez-de-chaussée, 2 salles furent aménagées pour accueillir « l’école du dimanche » pour les enfants, ainsi que des temps d’étude biblique. Vers 1970, les locaux devenant exigus pour les quelque 65 membres de la communauté et leurs enfants, on décida de construire une nouvelle chapelle, inaugurée en 1973. Vieillissante, la tour-porche cessa définitivement d’être utilisée au début des années 1980. Si les idées n’ont pas manqué pour la réhabiliter, comme l’installation d’archives sur l’histoire des mennonites ou la création d’un foyer d’accueil pour groupes de jeunes, aucun projet ne vit le jour.
En 1990, l’édifice a été inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, tout comme d’autres vestiges du château : la maison du portier (2, rue Gaspard de Hatzel) et les 2 pavillons d’angle de l’enclos du jardin, dont un est bien visible dans le jardin de l’église actuelle (au 11, rue du château). 3
Depuis 2012, la tour-porche est propriété de la ville de Wissembourg. Pour le moment, la charpente a été consolidée, et une bâche posée sur le toit pour limiter les infiltrations d’eau.
Notes
- Une maquette du château, ainsi que divers objets et documents d’archives sont présentés dans une salle d’exposition située dans la chapelle mennonite, et visitable sur demande. Pour prendre contact, c’est ici
- Lire aussi : Jean HEGE, « Chapelles et lieux de rencontre des mennonites de l’Outre-Forêt », in Souvenance Anabaptiste n°42-2024 (Bulletin annuel de l’AFHAM, Association française d’histoire anabaptiste mennonite), pp.42-55. Voir aussi : www.histoire-menno.net
- Voir la notice « Geisberg – château et ferme » sur la base Inventaire Grand-Est
Illustrations
- La tour-porche, les dépendances attenantes et au premier plan, des vignes aux abords du château. Carte postale ayant circulé en 1913, éd. Hofmann & Reitz Kunstverlag, Strasbourg.
- Le corps de logis du château du Geisberg vu depuis la tour-porche, avant 1940. Carte postale éditée par R. Ackermann, Wissembourg.
- Au-dessus de la chaire, le mur porte un verset tiré de l’épître aux Hébreux 13.8 : « Jesus Christus gestern und heute und derselbe auch in Ewigkeit » : Jésus Christ est le même hier, aujourd’hui et pour l’éternité. (Coll. privée, Jean Hege)
- Détail de la cloche conservée au Geisberg. Zacharie Rohr, 1714. Crédit photo : Philippe Jacky
- Lors de l’inauguration de la chapelle restaurée, le 31 août 1947. (coll. privée, Jean Hege)
- Vue de l’arrière de la chapelle vers 1970-71. (Coll. Privée, Jean Hege)